- Introduction
- Le concept de classe inversée
- L’utilisation d’un instrument
- La préparation d’une séance de travaux pratiques
- La synthèse d’informations : la création de cartes mentales
- La représentation graphique de phénomènes naturels : la tectonique des plaques
- La création de capsules vidéo et la classe renversée
- La classe inversée à l’heure du confinement
- Conclusion
- Bibliographie – courte
Introduction
La classe inversée (flipped classroom en anglais) est une approche pédagogique très à la mode dans le monde de l’éducation. De nombreux ouvrages sur le sujet sont parus, tels que Classes inversées – Enseigner et apprendre à l’endroit !, ainsi qu’un CLOM (= cours en ligne ouvert et massif, ou MOOC) observant les activités dans diverses matières mettant en jeu une classe inversée. Une manifestation nationale CL!SE (CLasse !nversée : la SEmaine) permet aux enseignants qui la pratiquent d’accueillir d’autres enseignants – sur leur temps libre pour le moment, ce qui ne facilite que peu la rencontre entre enseignants – dans leurs cours lors de séances recourant à la classe inversée.
Présentée souvent comme une manière d’enseigner « moderne », qui serait à l’inverse de la traditionnelle, qui consisterait à aborder les notions en classe et les applications à la maison (devoirs maison, exercices d’application, exposés qui prolongent le cours, etc.), cette approche pédagogique postule dans sa forme originelle que, à l’ère du numérique, toutes les informations sont disponibles aux apprenants (élèves, étudiants, stagiaires) et peuvent aborder toutes les notions théoriques à leur rythme, en autonomie, afin de pouvoir aborder les activités plus pratiques, réflexives, applicatives, bref, intéressantes, en classe, avec l’enseignant. Ce postulat ne manque pas d’attirer des critiques fondamentales sur l’accessibilité aux informations indiquées par l’enseignant (problèmes de connexion internet, ambiance favorable au moment de la consultation des ressources) et leur véritable compréhension par un élève souvent seul devant son écran. Et tout enseignant avec un minimum d’expérience sait bien que les générations Y et Z ne sont pas si à l’aise avec le numérique, et encore moins avec des usages autres que ceux auxquels elles trouvent une utilité dans la vie courante.
Mais à quelles problématiques la classe inversée tente-t-elle de répondre ? Celles-ci sont multiples :
- la massification de l’enseignement : les élèves sont plus nombreux en classe et menés à la fin de la scolarité obligatoire jusqu’à seize ans. Une pédagogie frontale est de moins en moins adaptée, sauf dans certaines circonstances. Et parmi eux, il y a des enfants/adolescents pour qui l’école telle qu’elle est conçue ne convient pas. Il y a lieu de mettre en place de nouvelles pédagogies pour prendre en compte leur diversité et mettre en place des stratégies de différenciation pédagogique ;
- la motivation des élèves pour les enseignements est donc à maintenir et à raviver si nécessaire pour des élèves sur la pente du décrochage scolaire ;
- pour cela, proposer de changer le schéma leçon en classe – devoirs/apprentissage à l’occasion permet de rompre la monotonie, non seulement de son propre enseignement, mais également celui des collègues des autres matières ;
- et la classe inversée a pour principe de proposer des activités en classe, si possible différentes de celles réalisées habituellement, afin que l’enseignant accompagne les élèves dans des situations plus interactives, et non pour « faire les devoirs en classe », ce que l’on entend dans certaines dérives du principe initial.
Presque devenue une injonction à destination des enseignants, la classe inversée suscite des avis très contrastés, le spectre s’étendant des prêcheurs (« La classe inversée permet de résoudre le problème des devoirs à faire à la maison. ») aux réfractaires (« La classe inversée n’apporte rien car les élèves qui ne jouent pas le jeu amènent l’enseignant à tout réexpliquer en classe. »). Entre ces positions extrêmes, la plus grande partie des enseignants s’interrogent sur l’investissement en travail/temps pour préparer ces séances, celui des élèves dans la prise de connaissance des contenus nécessaires à réaliser les activités à réaliser en classe, l’accès aux ressources en général en ligne des élèves et, bien entendu, sur l’intérêt pédagogique de cette approche.
Le but de cet article n’est pas d’analyser des séquences pédagogiques, les ressources citées plus haut le font déjà de manière assez complète, ou bien de convaincre de son bien fondé. Autant divulgacher immédiatement : je suis convaincu de l’intérêt de la classe inversée. Mais pas en permanence, pas pour toutes les notions, pas pour toutes les activités. Car comme toute « nouvelle » approche pédagogique, le message perçu par les professeurs face à la mise en avant de leurs pairs qui la mettent en œuvre est bien souvent celui d’une obligation car ne pas tenter de s’y prêter serait prendre le risque de paraitre dépassé, ne pas y parvenir un échec personnel et professionnel. L’investissement requis pour parvenir à mettre en place une séance de classe inversée peut sembler démesuré, les professionnels de l’éducation sont avant tout des individus déjà bien investis pour la très grande majorité, pris par leurs nombreuses tâches professionnelles, de la conception de leurs cours, l’évaluation des compétences, la correction des copies et leurs obligations administratives. Et ils ont une vie en dehors de leur métier.
Dans les lignes qui suivent, je présente quelques activités que j’ai pu mettre en place à plusieurs niveaux de classe avec pour objectif de couvrir une grande diversité d’objectifs à atteindre, de compétences mises en jeu, de profondeur de travail personnel pour l’élève, mais également pour partager mon point de vue sur les écueils qu’il convient d’éviter, qui mèneraient à faire perdre l’esprit de la classe inversée. Il nous faut faire confiance aux élèves : ils savent quand on les mène en bateau en leur promettant des façons originales de travailler et se retrouvent à réaliser les mêmes tâches qu’à l’accoutumée.
Bien évidemment, les séances décrites ci-dessous portent sur les sciences de la vie et de la Terre (SVT), mais également sur la physique-chimie (PC), et leur esprit peut naturellement être transposé à toutes les matières.
Le concept de classe inversée
Wikipedia (consulté le 24/01/2020 à 22h39) définit la classe inversée comme « une approche pédagogique qui inverse la nature des activités d’apprentissage en classe et à la maison. Les rôles traditionnels d’apprentissage sont modifiés selon l’expression « les cours à la maison et les devoirs en classe ». Autrement dit, les élèves doivent impérativement étudier leurs cours chez eux, pour que les activités en classe deviennent plus concrètes pour eux. Durant les heures d’ « apprentissages », ces derniers ne feront que des exercices d’application et de découvertes. Ce n’est plus l’enseignant qui apporte des connaissances d’un nouveau chapitre, mais il aidera l’élève pour la compréhension des notions importantes et aura plus de temps pour suivre l’élève au cas par cas. L’enseignant jouera donc le rôle de guide dans les apprentissages de l’élève. »
Si la pratique est particulièrement mise en avant aujourd’hui, le pédagogue Joseph Jacotot la mettait déjà à l’honneur au XVIIIe siècle. En tant qu’étudiants, nous avons tous été amenés/invités à travailler des notions pour préparer un cours, un TD ou une expérience de travaux pratiques. Et même en tant qu’élèves, nous avons tous eu à préparer un jour un exposé sur une partie du cours qui n’avait pas encore été traitée. Il peut donc être intéressant de transposer cette pratique de manière ponctuelle aux élèves afin de varier les approches pédagogiques et rompre la monotonie d’une séquence plus transmissive ou d’une suite de démarches d’investigation.
Le paragraphe suivant est intéressant : « Il est aujourd’hui impossible en l’état de porter un jugement général quant au bénéfice d’un tel dispositif, les résultats d’observations étant très fluctuants en fonction des catégories sociales des élèves, de leurs niveaux scolaires initiaux et des disciplines enseignées. Certaines études relativisent l’impact et les bénéfices de l’inversion du cours, qui seraient en réalité le fruit de la pédagogie active qui accompagne la classe inversée. »
L’évaluation des bénéfices d’une pratique pédagogique me semble toujours délicate, pour l’avoir pratiquée dès mon année de professeur stagiaire, sur l’apport de logiciels éducatifs pour l’acquisition de connaissances et de capacités sur le système nerveux. Qu’ont réellement acquis/compris les élèves ? Les activités proposées sont-elles bien adaptées aux élèves ? Sont-elles réellement utiles aux élèves pour mieux comprendre ou ne sont-elles que des « activités à clic », pour lesquelles il suffit de cliquer partout pour avancer et obtenir les réponses ?
La citation de l’article de Wikipedia mentionne la « pédagogie active », sur laquelle il est nécessaire de s’arrêter. La pédagogie active « a pour objectif de rendre l’élève acteur de ses apprentissages afin qu’il construise ses savoirs à travers des situations de recherche. » Les situations décrites dans cet article ne relèvent pas toutes de la pédagogie active, car toutes ne visent pas à résoudre un problème concret : il s’agit le plus souvent de varier les modalités de l’acquisition de connaissances.
Cependant, quelques éléments professionnels m’amènent à penser, mais cela reste à creuser, que les bénéfices de la classe inversée seraient peut-être à rechercher sur l’ancrage des connaissances et des compétences acquises sur le long terme.
L’utilisation d’un instrument
Les travaux pratiques sont au cœur des sciences expérimentales. Ils font l’objet d’une évaluation au baccalauréat dans le cadre des évaluations de compétences expérimentales (ECE) en terminale. Au collège, les horaires très serrés (1 h 30 hebdomadaire, avec des demi-groupes trop peu répandus en France) amènent à cibler les activités pratiques réalisables en l’espace d’une heure, en incluant la prise en main éventuelle d’un matériel nouveau pour les élèves.
La préparation des séances de microscopie est le passage obligé au regard des programmes scolaires, tant le microscope est d’usage courant tout au long de la scolarité, dans les mondes de la recherche et de la médecine. Traditionnellement, les enseignants de SVT mettent à disposition une fiche méthode décrivant l’utilisation du microscope, dans une pochette plastique pour un usage partagé, ou collée dans le cahier/classeur de l’élève pour faire office de référence. Feuille qui, dans mes dix années d’enseignement en REP+, n’a été, pour la quasi totalité de ceux qui ont suivi mes cours, qu’une feuille de plus parmi tant d’autres, malgré mes demandes répétées pour la leur faire retrouver dans leurs affaires. J’ai donc été amené à expliquer maintes et maintes fois l’utilisation de l’outil, de répéter aux élèves qui n’avaient pas saisi ou oublié son fonctionnement. Et pour toutes les classes. Chaque année.
En revenant à l’enseignement, je m’étais promis de me mettre en quête d’un moyen plus efficace de mettre à leur disposition cette fiche méthode. Une recherche sur le Net a débouché à cette vidéo présentant l’utilisation du microscope.
Les élèves se réjouissent toujours à l’annonce d’une séance de microscopie. C’est sur cet intérêt pour la séance à venir qu’il faut se reposer : je demande aux élèves de visionner la vidéo en question, intégrée à une page web de mon cru pour éviter aux élèves de s’égarer sur Internet. À mon sens, cette vidéo a pour premier intérêt d’être bien moins austère qu’une fiche méthode à lire à la maison, sans l’appareil sous la main. Je demande donc aux élèves, pour préparer la séance de microscopie, de visionner autant de fois que nécessaire la vidéo afin de bien comprendre la technique d’utilisation.
Lors de la séance, les microscopes sont mis à la disposition des élèves. Je donne des indications pour l’éventuel – il y en a fonctionnant sur batteries – branchement électrique des alimentations. Je demande alors aux élèves les premières étapes de montage des préparations du commerce et je me concentre sur les règles de sécurité pour éviter de les briser lors de l’utilisation de l’objectif le plus long. L’observation de l’aisance de certains me permet de leur demander d’aider les autres élèves en difficulté, organisant ainsi un embryon de tutorat entre pairs.
Les avantages de cette classe inversée pour l’apprentissage d’un nouvel outil sont multiples :
- les élèves ont pu assister à une démonstration commentée de l’utilisation du microscope, ce qui peut atténuer la somme d’informations à acquérir dans le temps restreint d’une séance et permettre de visionner autant de fois que nécessaire les passages moins bien compris ;
- la confiance de l’élève en lui-même peut être améliorée car ayant été préparé, il amoindrit le risque de se retrouver dépourvu devant le microscope ;
- la charge de travail de l’enseignant peut s’en trouver allégée mais surtout redirigée, il peut se concentrer sur les points délicats de l’utilisation de l’outil et accompagner les élèves les plus en difficulté.
Cette organisation de la séance de microscopie relève bien de la classe inversée : les élèves acquièrent bien des connaissances préalables à la réalisation d’une activité en classe, ce qui maximise le temps qui lui est consacré en présentiel, du moins pour ceux qui ont joué le jeu et ont bien assimilé le contenu de la vidéo. Bien entendu, des élèves n’ont pas visionné les vidéos ou préfèrent manipuler l’outil pour pouvoir assimiler. Dans ce cas, l’enseignant peut se consacrer à eux ou bien responsabiliser les élèves les plus avancés en les désignant comme tuteurs ponctuels.
Lors de la séance précédant celle de travaux pratiques, j’insiste sur les risques à ne pas visionner la vidéo (ne pas pouvoir effectuer le travail qui sera demandé par perte de temps d’utilisation du microscope, briser les lames) mais également sur le fait que je ne peux contrôler qu’ils auront réellement visionné la vidéo. Sur des plateformes comme Moodle, cela serait possible – les élèves se connecteraient et le clic sur la vidéo serait enregistré -, mais je trouve cela particulièrement contre-poductif. Les enseignants qui ont suivi des parcours Magistère savent bien que si le clic est enregistré, la diffusion de la vidéo en entier ne l’est pas. Et qui sait si la personne a effectivement rivé son regard sur le contenu – cela viendra, les réseaux sociaux travaillent sur ce sujet afin de monnayer au mieux leurs espaces publicitaires ? En choisissant de ne pas contrôler le clic sur le vidéo, tâche que je considère comme particulièrement inutile, je fais également celui de faire confiance aux élèves. Et en renouvelant cette marque de confiance, tout en sanctionnant ceux qui la rompraient en ne faisant pas leur travail – chaque activité étant évaluée, le couperet tombe immanquablement -, l’enseignant instaure un climat scolaire favorable. C’est cela la bienveillance, et non ce que beaucoup confondent à du laxisme.
La préparation d’une séance de travaux pratiques
J’ai été amené à assurer l’enseignement intégré des sciences (EIS) en classe de sixième. Sans celui de technologie, j’ai assuré à la fois celui de SVT et de physique-chimie (PC). Une des notions du cycle 3 est celle des mélanges homogène et hétérogène.
La problématique choisie est : « Peut-on rendre un mélange hétérogène homogène ? » La première activité est une séance de travaux pratiques proposant de réaliser différents mélanges, afin de déterminer ce que sont des mélanges homogène ou hétérogène, ainsi que la notion de substances miscibles, de substances immiscibles et d’émulsion.
Afin de mettre en application ces notions, il est demandé aux élèves de visionner une vidéo montrant la création d’une lampe à lave, de prendre des notes s’ils le veulent, et de les amener en classe :
La réaction chimique entre le bicarbonate de soude et le vinaigre entraine la formation de bulles de dioxyde de carbone, qui font remonter les billes de vinaigre à la surface. Au contact de l’air, les bulles éclatent en libérant le dioxyde de carbone. Les billes de vinaigre retombent alors au fond du tube, où elles entrent à nouveau en réaction avec le bicarbonate de soude, et ainsi de suite, jusqu’à consommation des réactifs.
Le compte-rendu de TP attendu est le suivant :
Les élèves ont à disposition l’ensemble des réactifs nécessaires, ainsi que des tubes à essais, pour réaliser une lampe à lave. L’enseignant ne donne que des consignes concernant l’utilisation des produits. Pour le reste, les équipes de deux ou trois élèves élèves prennent connaissance de la consigne et, en se basant sur leurs notes, réalisent le montage expérimental, tout en remplissant le compte-rendu de TP. L’enseignant circule entre les paillasses, questionne les élèves sur leur dispositif et les réponses aux questions du compte-rendu. Il leur demande de décrire ce qui se produit dans le tube à essais et d’expliquer la réaction chimique – sans, bien évidemment, en écrire l’équation chimique.
Lors de la séance suivante, l’enseignant rend les compte-rendus aux élèves, mène une correction en groupe et explique les points mal traités par l’ensemble de la classe. À son issue, il demande aux élèves de reformer les équipes pour réaliser une capsule vidéo. Elles doivent rédiger un commentaire qui accompagnera la vidéo et le faire valider par l’enseignant. Elles répètent l’expérience, tout en lisant à haute voix le commentaire, afin de trouver un rythme convenable pour les deux. En suivant les consignes de tournage, elles réalisent le tournage en lisant le commentaire. La bande son de la vidéo est ultérieurement remplacée par le commentaire audio, enregistré ultérieurement par les élèves. Le montage son et vidéo est soit réalisé par leurs soins, soit par l’enseignant, en fonction de leur aisance à utiliser une app de montage vidéo.
Dans le même ordre d’idées, en classe de cinquième, dans la leçon sur la reproduction et la génétique (disponible dans l’Espace enseignants), les élèves ont à faire le lien entre les chromosomes et le patrimoine génétique des individus. Ils ont alors été observés au microscope et leur très petite taille (10 µm pour le chromosome humain n° 1) est mise en avant. En faisant appel à leurs connaissances, issues de leurs lectures, des documentaires et séries télévisées, des films et des dessins animés, il est indiqué aux élèves que les chromosomes sont faits d’ADN (acide désoxyribonucléique), acronyme qui leur est familier.
Il leur est proposé d’extraire, lors de la prochaine séance, l’ADN de la banane et d’effectuer des recherches sur l’encyclopédie Vikidia. Et pour la préparer, les élèves ont à visionner la vidéo suivante :
Extraire l’ADN de la banane : réalisé au CEA de Fontenay-aux-Roses, Réseau Canopé
Lors de la séance de travaux pratiques, les tâches doivent se répartir entre les membres de l’équipe d’élèves pour réaliser l’extraction d’ADN, compléter le dessin décrivant le TP et les recherches sur Vikidia, afin de rendre le compte-rendu à la fin de l’heure.
Le but de ce TP est de montrer que l’ADN est une molécule exceptionnellement longue (environ 1 m pour un seul chromosome), au point de la voir à l’œil nu – ce sont les filaments blancs qui surnagent dans l’alcool. Les recherches sur Vikidia permettent de collecter des informations sur l’ADN (signification, longueur), mais également de comprendre comment des molécules si longues peuvent tenir à 46 dans le noyau d’une cellule humaine : les molécules sont très fortement enroulées, ce qui les condense suffisamment pour leur donner une dimension microscopique. La structure de l’ADN en double hélice n’est évidemment pas au programme du collège, mais elle fait le lien avec sa représentation souvent utilisée dans les programmes pédagogiques courts télévisuels, les dessins animés et les films fantastiques ou de science-ficton.
Lors de la séance de restitution des compte-rendus de cette expérience, la correction se prolonge par un dessin récapitulant la structure d’un chromosome, afin de fixer les représentations d’une longue molécule fortement enroulée, elle-même constituée d’une double hélice. La trace écrite reprend la signification de l’acronyme et énonce cette structure condensée.
Au vu de ces deux exemples, l’approche pédagogique de la classe inversée présente plusieurs avantages :
- les élèves ont pu se familiariser avec l’expérience à réaliser lors de la séance suivante, en visionnant la vidéo à leur rythme, et autant de fois que nécessaire. Ils ont pu prendre des notes et les apporter en classe, ce qui peut les rassurer par rapport à une évaluation somamtive ;
- ils ont pu réaliser une séance de travaux pratiques et mettre par écrit le principe de la réaction chimique à l’œuvre, avec leurs mots ; l’enseignant, en accompagnant les élèves durant cette séance, peut éclaircir certains points et aider à reformuler ce qu’ils avaient compris ;
- toutes ces activités pratiques peuvent ainsi tenir dans une séance d’une heure, ce qui n’aurait pas pu être le cas si l’enseignant avait dû, en plus, expliquer ce qui était à faire ;
- la correction du compte-rendu d’expérience amène à éclaircir à nouveau les points difficiles, en s’appuyant sur les souvenirs des élèves de cette séance de travaux pratiques ;
- la création d’une capsule vidéo permet de mettre par écrit une nouvelle fois ce qu’ils ont compris et de mettre en scène l’expérience de manière ludique ;
- en mettant en ligne les productions vidéo des élèves, les élèves partagent leur savoir avec tous leurs camarades, même au-delà de leur établissement ;
- la trace écrite (disponible dans l’Espace enseignant), consécutive à toute cette démarche pédagogique, fixe dans le cahier/classeur les notions abordées et la réaction chimique ;
En comptant bien, les élèves de sixième ont ainsi pu travailler cette expérience, et par conséquent les notions de mélange hétérogène et de réaction chimique, cinq fois, ce qui maximise la répétition, de différentes manières, point primordial pour l’appropriation des connaissances et des capacités.
La synthèse d’informations : la création de cartes mentales
Dans le cadre de l’étude des relations entre le monde microbien et les autres règnes, le microbiote intestinal a une place particulière dans l’esprit des élèves. Beaucoup ont entendu parler de la « flore intestinale » vantée par les publicités des alicaments ou par leurs parents. Je n’ai pas trouvé d’approche pédagogique vraiment convaincante au regard de ma pratique pour aborder cette thématique de manière intéressante, mais je suis certain qu’il y en a beaucoup et je suis toujours intéressé par les solutions des enseignants. En ce qui me concerne, j’ai fait le choix de demander aux élèves de consulter un corpus de vidéos à la maison afin de préparer l’activité de la séance suivante, avec parmi elles, la vidéo suivante :
Instruction leur est donnée de visionner chacune des vidéos listées et de noter les idées et informations fournies par chacune d’elles à la maison. Les élèves sont invités à amener leurs notes, mais ne sont pas avertis de l’activité qu’ils auront à réaliser à la prochaine séance. Un tutoriel vidéo peut être également visionnée pour prendre en main un logiciel, MindMaps, s’ils ne l’ont pas déjà utilisé.
Lors de cette séance d’une heure, les élèves prennent connaissance de l’activité à réaliser. L’ossature de la carte mentale figure sur la feuille comportant la consigne et l’évaluation par curseur : il s’agit de replacer les idées et informations relevées dans les vidéos en répartissant à gauche et à droite les informations concernant le microbiote intestinal et ses fonctions.
Les élèves ont pour consigne d’enregistrer leur production dans le dossier commun de la classe pour impression et évaluation. Au retour des cartes mentales aux élèves, celle qui était attendue, préparée par le professeur, est projetée pour comparaison avec celles produites. La correction de l’activité devient le moment de la mise en commun des informations relevées par les élèves, ainsi que de discussion entre tous. Le fait qu’ils aient pu s’informer en amont sur le sujet et organiser leurs connaissances permet de nourrir le débat, de générer des interrogations et donc des interactions au sein du groupe. Les élèves ne sont donc pas vierges de toute connaissance sur le sujet, qu’ils ont abordé à trois reprises : lors du visionnage des vidéos, lors de la construction de la carte mentale, lors de la correction et du débat.
Je réitère cette activité, afin de mobiliser de nouveau ces mêmes compétences autour des notions centrées sur le développement durable, qui comportent de nombreuses entrées et sont multifactorielles. À mon sens, il est difficile, parce que chronophage, de les aborder dans le cadre d’une séance plus « classique » par une étude de documents, distribués sous forme de dossiers. Les informations étant nombreuses, l’étape incontournable reste leur saisie, leur compréhension et leur organisation. Un travail en équipe permettrait de les relever avant de les organiser. La proposition d’un jeu de rôle est intéressante pour les élèves, la préparation des arguments de chaque équipe peut se faire en dehors de la classe, la tenue du débat et la mise en commun peuvent cependant occuper deux séances.
Dans le cas de la transition énergétique et le développement durable, j’ai fait le choix de demander aux élèves de consulter un corpus de vidéos à la maison afin de préparer l’activité de la séance suivante, avec parmi elles, la vidéo suivante :
Les élèves peuvent ainsi, chacun de leur côté, visionner, mettre en pause, revoir les vidéos, à leur rythme. Il leur est demandé de prendre des notes et de les apporter à la séance suivante. Lors de cette séance d’une heure – ou un peu plus, si nécessaire -, les élèves prennent connaissance de l’activité à réaliser. L’ossature du diagramme est projetée à la classe : ils doivent replacer les idées et informations relevées dans les vidéos selon les trois composantes du développement durable (société, économie, environnement). Ceci permet de mobiliser les connaissances autour de cette notion, déjà largement abordée dans les programmes d’histoire-géographie. Une nouvelle fois, l’enseignant peut susciter la discussion au sein de la classe sur la thématique, avec des élèves informés, sur les éléments qu’ils ont relevé. Il circule entre les élèves pour répondre à leurs interrogations, questionner le placement des notions sur le document, accompagner les élèves en difficulté, pendant que les équipes les plus autonomes avancent à leur rythme.
Et que faire d’eux une fois qu’ils auront terminé, sans doute plus rapidement que les autres ?
Plusieurs options sont possibles, comme :
- une activité d’approfondissement : la lecture d’un article, le visionnage d’une autre vidéo, une activité écrite sur le même thème, etc.
- noter la trace écrite (le cours) correspondant à l’activité de la carte mentale, les autres élèves auront à la noter à la maison, en accédant au cours en ligne de l’enseignant ;
- réaliser l’activité suivante prévue par l’enseignant pour avancer dans le cours ;
- tutorer les élèves en difficulté, en leur recommandant de ne pas leur donner de réponses, mais d’indiquer ce qui leur semble être correct ou erroné dans le travail de leurs camarades.
Les activités ne manquent donc pas pour les élèves les plus à l’aise avec ce que leur demande l’enseignant, elles ont pour elles l’avantage de les valoriser.
La représentation graphique de phénomènes naturels : la tectonique des plaques
La tectonique des plaques, j’ai toujours trouvé cela fascinant à étudier. À enseigner également. À la fin des années 1990 – pas de commentaire -, j’étais en poste en ZEP – aujourd’hui REP+ – et j’avais à cœur de trouver une approche pédagogique pour aborder les notions de divergence et de convergence de plaques et gommer au mieux les conceptions issues des dessins animés, des films de science-fiction. J’essayai de les faire dessiner ces mouvements en perspective cavalière, et cela m’a appris que cette représentation posait beaucoup de problèmes, malgré mes efforts pour les accompagner dans le dessin en 3D. En 2003, dans le cadre d’une le cadre du département interdisciplinaire de Recherche et de Formation (DIERF) de l’IUFM de Nice, j’ai participé à une étude avec des collègues du premier degré et de l’université de Nice – Sophia Antipolis sur la perception et la représentation de ces phénomènes, des écoliers aux étudiants. Nous les trouvions ardues, et elles le sont toujours, bien que le déplacement dans des mondes en 3D réels et surtout virtuels ne pose aucun problème – si ce ne sont des maux de crâne éventuels – dans les films et les jeux vidéo.
Dans les années qui ont suivi, j’ai envisagé des approches différentes, en variant les suppports papier, les approches épistémologiques, les vidéos extraites de DVD – Youtube n’existait pas alors -, les découpages de continents pour amener la notion de dérive des continents, mais tous ces efforts ne me semblaient pas très efficaces. Bien entendu, la motivation des élèves est primordiale pour apprendre, et je concède que malgré mon approche par compétences – S’informer, Raisonner, Communiquer, Réaliser, puis les sept compétences du socle commun de 2006 -, je ne parvenais pas à en susciter une suffisante.
Après une pause de neuf années dans mon métier de professeur, je suis revenu à l’enseignement, et avec la ferme intention d’aborder ces notions avec une approche différente. Et avec les moyens techniques du XXIe siècle. Les élèves ont depuis accès à Youtube et à de multiples plateformes de vidéos, mais également à des chaines de télévision proposant de nombreux documentaires, qui abordent tous les sujets que l’on peut aborder en classe. L’hypothèse de départ est donc que les élèves ont quelques conceptions, sans doute plus justes qu’une décennie auparavant, et qu’il leur est donc possible de comprendre des vidéos pédagogiques sur le sujet.
À ce point de la leçon en classe de 4e, les élèves ont abordé la structure de la Terre (le cours complet est disponible dans l’Espace enseignants). Je leur demande alors de visionner à la maison un corpus de vidéos relatif à la tectonique des plaques. Pour ceux qui n’en ont pas la possibilité, je demande de prendre rendez-vous avec le professeur documentaliste d’ici la prochaine séance – prévue la semaine suivante – pour accéder à un ordinateur connecté à Internet. En dernier recours, je demande à l’élève ou lui prête une clé USB pour y coller toutes les vidéos préalablement téléchargées. Ainsi, la totalité des élèves peuvent visionner les vidéos demandées.
Il est conseillé aux élèves de prendre autant de notes qu’ils veulent, de faire des croquis, de rechercher des définitions si nécessaire, mais surtout de les amener. La seule annonce faite est qu’il leur sera nécessaire d’être trois ou quatre par équipe et qu’il faudra nécessairement se partager le travail et collaborer, car la quantité de choses à faire sera importante.
Au début de la séance suivante, trois activités sont distribuées à chaque équipe :
-
- une activité numérique, qui s’appuie sur un texte décrivant la genèse de la théorie de la dérive des continents de Wegener ; elle consiste à réemboiter les continents en utilisant les outils déplacement/rotation de LibreOfficeTM Draw. La consigne est reproduite ci-dessous ;
-
- le coloriage et l’annotation d’un bloc diagramme de dorsale océanique ;
-
- le coloriage et l’annotation d’un bloc diagramme de zone de subduction.
Les élèves peuvent consulter leurs notes, même revoir des vidéos – ce qui leur fait perdre du temps et bien comprendre qu’il aurait vraiment fallu les visionner avant de venir… Les seules instructions données sont qu’ils ont besoin de télécharger le document LibreOfficeTM Draw contenant les continents à replacer sur le site SVT Collège, ajouter un cadre de texte pour renseigner les noms des membres de l’équipe et d’enregistrer le tout dans le dossier « devoirs » de la classe.
En une heure de cours, le rythme de travail est soutenu. La circulation dans les rangs permet de rappeler les consignes, de questionner la pertinence des réponses, de relancer les élèves les moins scolaires en martelant que cette séance amènera trois évaluations de compétences et donc trois notes – cela suffit souvent à les remotiver !
Les réponses attendues sont les suivantes :
À la fin de la séance, les activités sur les blocs diagrammes sont ramassées, celle sur la dérive des continents imprimée pour chaque membre des équipes avant correction.
La correction avec les élèves est finalement la partie la plus longue : chaque activité est le point d’appui d’un paragraphe du cours, corrigée avec les réponses attendues projetées au tableau et, pour que la trace écrite dans le cahier/classeur soit juste, un exemplaire vierge est distribué pour prendre la correction, afin que les erreurs de d’annotation et de coloriage ne gênent pas la mémorisation.
Afin de mobiliser les connaissances acquises lors de ces activités, les élèves doivent, dans une séance ultérieure plus classique, colorier et annoter des dessins de la formation de la chaine himalayenne et aboutir à la notion de collision.
Cette approche pédagogique amène les élèves à refaire les dessins plusieurs fois, et ainsi à favoriser la mémorisation de ces phénomènes dont le principe est simple en apparence (des plaques s’écartent, s’approchent l’une de l’autre, ou s’empilent l’une sur l’autre), mais dont la représentation graphique semble difficile à assimiler, sans doute de par la taille des objets en jeu et la complexité de la structure de la Terre. Ainsi, les contacts des élèves avec les dessins des phénomènes et le vocabulaire associé est multiplié.
La création de capsules vidéo et la classe renversée
La création de capsules vidéo est détaillée dans cet article. L’idée est de permettre aux élèves de s’approprier les connaissances et les capacités en produisant leurs propres supports. Ainsi, en devenant producteurs, avec la responsabilité d’en produire à destination d’élèves qui voudraient mieux comprendre, apprendre ou revoir, la posture des élèves change totalement.
L’idée est ici de proposer aux élèves de réaliser une capsule vidéo sur une leçon qu’ils n’ont pas abordée en classe. La classe inversée n’est donc pas limitée à une partie d’un cours, mais elle porte sur le cours entier. L’idée est de faire travailler chaque équipe d’élèves sur une partie de la leçon, afin de constituer, en fin de production, une capsule vidéo sur l’ensemble de la leçon. Ainsi, les élèves sont entièrement acteurs de leurs savoirs.
Afin de ne pas se trouver en porte-à-faux avec la progression de l’année, il est nécessaire de trouver un équilibre entre les séances consacrées à la leçon traitée sous forme de classe inversée et de capsule vidéo et celles organisées plus classiquement. Ces séances doivent être suffisamment espacées pour laisser aux élèves le temps de préparer à la maison le travail à réaliser en classe, mais pas trop pour ne pas perdre leur intérêt pour ce projet au long cours. Ainsi, j’ai adopté un rthme d’une séance tous les quinze jours, qui s’adapte à mon sens tout aussi bien à l’horaire d’une heure et demie hebdomadaire des sciences et de la technologie au collège, mais également à toute matière.
La première partie consiste à bien définir ce qui est attendu des élèves. L’explicitation de la consigne s’articule autour de six éléments :
-
- la projection d’une capsule vidéo réalisée par d’autres élèves, ou le rappel des capsules vidéo qui ont déjà été réalisées par certains ;
- l’explicitation de la consigne, avec un énoncé clair de la méthode de travail à mettre en œuvre et des livrables ;
-
- la constitution des équipes et la répartition du travail entre chacune d’elles ; celles-ci se font sur la base du volontariat et, en derniers recours, par choix du professeur et compétition de shifumi !
- l’explicitation de l’évaluation par compétences. Le travail étant long, les compétences mises en jeu sont nombreuses. Celles-ci sont indiquées sur la feuille comportant la consigne, mais les points d’étape sont présentés sur un tableau d’évaluation. Les élèves savent ainsi que chaque étape du travail est l’objet d’une évaluation de compétence et d’une note – ce qui ne manque pas de motiver les élèves. Ainsi, quatre évaluations sont prévues – la cinquième est envisagée si l’équipe d’élèves réalise elle-même le montage de sa capsule vidéo -, ce qui représente une part importante de la moyenne trimestrielle de chaque élève. Ceci est un argument fort pour insister sur l’importance de ce travail de classe inversée et de capsule vidéo ;
Comme vous pouvez le constater, toutes les équipes d’élèves peuvent ne pas fonctionner, surtout si elles comptent des éléments en décrochage scolaire. On ne gagne pas à tous les coups…
- le visionnage de vidéos et la lecture de documents sélectionnés, comme celles pour la digestion en cinquième ou pour la protection des abeilles. Il est demandé aux élèves d’y chercher les informations nécessaires à la réalisation de leur capsule vidéo, de noter tout ce dont ils ont besoin, mais également de chercher les définitions des mots qu’ils ne comprennent pas. La recommandation est que leurs notes doivent être claires, compréhensibles parce que toutes les informations doivent y figurer ;
- la distribution des autorisations parentales sur l’image et la voix à faire signer et à récupérer avant la production finale.
Les séances en classe ont plusieurs objectifs :
- permettre de faire le point sur l’avancement du travail : ainsi, en début de production, les élèves doivent rechercher des informations sur la thématique de leur capsule vidéo. Ces éléments doivent être validés par l’enseignant avant qu’ils puissent écrire le scénario ; le storyboard doit être également visé par le professeur, qui doit vérifier la cohérence, envisager les difficultés possibles à la réalisation, orienter le type de capsule vidéo à réaliser (diaporama, film d’animation, intervention face caméra, etc.) en fonction du sujet et de l’appétence des élèves ;
- ménager un espace et un temps pour que les équipes puissent se réunir et travailler ensemble, et ainsi poursuivre la mission de conseil et de direction artistique de l’enseignant à chaque étape de production ;
- motiver les élèves en difficulté ou décrocheurs afin qu’ils apportent leur contribution au travail collectif ;
- adapter le planning en fonction de l’avancement des équipes : certaines peuvent commencer le tournage, alors que d’autres en sont encore à définir le storyboard ou à dessiner les éléments à animer. Il faut donc que le professeur puisse indiquer quoi faire à chaque équipe tout en ne perdant pas le fil de la production ;
- diffuser le montage final de la capsule vidéo, ainsi que le lien permettant de la consulter à domicile, et ouvrir la critique des élèves sur le travail réalisé.
Les capsules vidéo suivantes ont été produites selon cette approche pédagogique :
Et comment les équipes d’élèves peuvent-elles connaitre les parties de la leçon que les autres ont traitées ? Il y a plusieurs approches pour cela :
- les élèves ont dû visionner toutes les vidéos pour collecter les informations nécessaires à leur propre capsule vidéo, et rechercher les définitions des mots nouveaux. Ils ont déjà une bonne idée du contenu de la leçon ;
- la leçon complète peut être distribuée à tous les élèves ou à recopier à la maison, afin de rassurer les élèves habitués à avoir une trace écrite dans leur cahier/classeur ;
- un résumé de la leçon peut être distribué par l’enseignant, si la leçon s’avère trop longue à recopier ;
- une synthèse peut être construite avec les élèves, en utilisant les connaissances accumulées par chaque équipe ;
- la transcription du commentaire de la capsule vidéo complète peut être réalisée de manière automatisée, puis distribuée aux élèves.
Ainsi, avec cette approche, les élèves sont à la fois mis en position de producteurs de supports de savoir, tout en ayant la possibilité de conserver une trace écrite de la leçon ainsi traitée. C’est une approche de classe renversée !
La classe inversée à l’heure du confinement
Le confinement vécu depuis le 16/03/2020 par l’ensemble de la population française est inédite. Dans l’urgence, tous les enseignants ont dû revoir leurs supports, mais surtout manière d’enseigner et d’évaluer. Beaucoup se sont lancés dans la transposition de leurs cours en visioconférence, d’autres ont proposé des révisions, des consolidations des acquis, des approfondissements. Et il est certain que la montée en compétence dans l’utilisation des outils numériques durant cette période a été exponentielle, en tout cas ici bien plus importante qu’après des années de plan académique de formation et d’autoformation.
La classe inversée peut tout à fait prendre sa place dans cette continuité pédagogique pour alléger la charge de travail des élèves et des enseignants. Compte tenu de ce que sont amenés à faire les enseignants à distance, beaucoup ne sont plus loin d’une approche de classe inversée, que l’on pourrait décliner de la sorte :
- des vidéos, des textes, des animations pour expliquer la notion à aborder, le tout à visionner avant la prochaine séance, seraient communiquées aux élèves avant la prochaine séance. Tous les élèves pourraient prendre les notes qu’ils veulent sur les documents à consulter, les garder avec eux pour faire ce qui leur sera demandé ;
- dans l’horaire de la classe (1h, 1h30, 2h, 3h, 4h par semaine), les enseignants envoient dans Pronote/École Directe/Sacoche les activités à réaliser pendant la séance – si possible sous format modifiable, ou bien des instructions de ce qu’il y a à faire et qu’il faudra photographier une fois terminé. Les enseignants seraient en visioconférence/tchat/liste de diffusion pour accompagner les élèves dans la réalisation de la ou des activités durant la séance ;
- les élèves renvoient leur production à la fin de l’heure pour évaluation formative – fichier traitement de texte, fichier tableur, production de l’élève en photographie, etc. Si les élèves ne rendent pas leur production dans le temps imparti, les enseignants peuvent prolonger la séance en asynchrone pour les accompagner ou bien ne pas tenir compte de l’absence de rendu pour cette (ces) activité(s) ;
- l’enseignant diffuse, avant la fin de la séance, la trace écrite à noter dans le cahier par visioconférence/Pronote/École Directe/Sacoche – on évite ainsi toute impression et on fait pratiquer l’écriture manuscrite ;
- l’enseignant renvoie les activités évaluées aux élèves et propose un corrigé en asynchrone ;
- lors de la séance suivante, il accompagne la correction en visioconférence/tchat/liste de diffusion ;
- lorsque l’enseignant pense avoir terminé une séquence/un type d’activité/un cours, il annonce qu’il proposera un QCM en ligne ou une activité du même type que celles vues dans les séances précédentes à la prochaine séance, que les élèves devront renvoyer au professeur au cours de la séance. Cette évaluation « sommative » s’ajouterait aux formatives précédentes.
Ainsi, les élèves travailleraient bien selon leur horaire de classe, sauf pour consulter les documents nécessaires pour comprendre la leçon avant la séance.
Cette proposition d’organisation de classe inversée est, comme son nom l’indique, une proposition. Toutes les modalités sont adaptables en fonction de la personnalité du professeur, l’aisance des élèves et de l’enseignant avec les outils numériques et l’habitude des élèves à fonctionner en classe inversée.
Il est certain que ce confinement est devenu un immense champ d’exploration de ce que peut être un enseignement à distance, et que la classe inversée mérite d’y être intégrée.
Conclusion
La classe inversée présente ainsi plusieurs avantages :
- augmenter les contacts avec les notions, par la diversité des activités proposées en amont (visionnage de vidéos, prise de notes), pendant et en aval de la séance en présentiel (correction, trace écrite, activités ultérieures) ;
- permettre aux élèves de se confronter aux notions à leur rythme, en visionnant les vidéos à leur rythme, autant de fois que nécessaire. Ceci constitue une première approche de la différenciation pédagogique ;
- proposer des approches différentes de celles adoptées habituellement, mais surtout une organisation temporelle autre. Comme énoncé en principe liminaire, il n’est pas souhaitable de n’employer qu’une seule approche pédagogique. La variété permet de maintenir l’attention et l’intérêt des élèves ;
- proposer de mettre les élèves en activité en équipe. L’expérience m’a montré que le travail en équipe d’élèves crée des dynamiques qui amènent les élèves à collaborer, à s’aider, à s’exprimer au-delà de ce qu’ils feraient seuls. La classe inversée amène les élèves à travailler autrement et à prendre collectivement en charge la différenciation pédagogique, au sein de l’équipe, mais également lorsque les élèves qui ont terminé plus rapidement que les autres peuvent tutorer leurs camarades ;
- organiser des discussions et des débats avec des élèves éclairés, car avoir pu prendre connaissance de notions par eux-mêmes, mobilisées par des activités en classe, c’est donner la possibilité de mieux se les approprier et de prendre du recul par rapport à elles ;
- mêler le numérique aux activités pratiques et papier pour diversifier les supports, ce qui facilite l’acquisition des compétences du cadre de référence des compétences numériques (CRCN), mais également celles du socle commun. Prosaïquement dit, il est possible de faire d’une pierre deux coups ;
- maintenir et raviver la motivation, même si ce n’est pas la panacée, y compris celle d’élèves en voie de décrochage scolaire ;
- faire confiance aux élèves, en ne contrôlant pas le visionnage des vidéos ou les notes prises, car l’évaluation ne porte pas sur ces compétences, mais sur ce qu’ils vont en faire et sur ce que ces connaissances leur permettront de découvrir par la suite.
La classe inversée est une modalité de mise en place de pédagogies actives : elles amènent les élèves à être en activité et acteurs de leur savoirs. Si la première modalité est essentielle pour apprendre, la seconde va plus loin, pour une meilleure appropriation.
La citation de Xun Kuang (Xun Zi) « Tu me dis, j’oublie. Tu m’enseignes, je me souviens. Tu m’impliques, j’apprends. » est toujours d’actualité et devrait guider toute conception de séquence pédagogique.
Bibliographie – courte
- « Classe inversée », Wikipedia, consulté le 29 janvier 2020.
- NIEDERKORN F., « La classe inversée, une piste pour la pédagogie du futur », Les Échos, 16 octobre 2017.
- FAILLET F., « La pédagogie inversée : recherche sur la pratique de la classe inversée », Persée, 2014.
- GUILBAUT M., VIAU-GUAY A., « La classe inversée comme approche pédagogique en enseignement supérieur : état des connaissances scientifiques et recommandations », Ripes, 2017.
- « Classes inversées et pistes pédagogiques », Mission laïque française, 17/05/2020.
- « Principes de la classe inversée, définitions, témoignages », CanoProf, consulté le 06/12/2022.
- LEBRUN M., GILSON C., GOFFINET C.,« Vers une typologie des classes inversées – Contribution à une typologie des classes inversées : éléments descriptifs de différents types, configurations pédagogiques et effets. », Université catholique de Louvain, 2016.
- LEBRUN M., LECOQ J., Classes inversées – Enseigner et apprendre à l’endroit ! », Canopé Éditions, 2016.
- DEVIN P., « Les leurres de la classe inversée », Médiapart, 13 février 2016.
À propos de l’auteur